“Transmettre à son tour”

Freud et Lacan

Textes de

Marcelo GARGIULO

Portrait noir et blanc de Sigmund Freud
Un homme avec une veste sombre, debout à côté d'un tableau noir, écrivant avec une craie. À côté de lui, il y a une table avec deux microphones. Sur le tableau, il est écrit en français : "D'innocence jusqu'au servage du serpent".

Ce site est né du désir de rassembler, en un lieu unique, l’essentiel de mon travail consacré à la transmission de la psychanalyse.

À travers quatre ouvrages issus d’enseignements reçus et dispensés, de pratique et de recherche, j’ai cherché à faire entendre la parole de Freud et de Lacan dans sa rigueur vivante, à la fois conceptuelle et clinique.

Ces livres témoignent d’un même fil : celui d’une lecture fidèle, ouverte, et toujours en mouvement — où penser reste un acte, et lire, une expérience de vie.

 Marcelo Gargiulo

 

Portrait d'un homme âgé avec des cheveux et une barbe blanche, portant des lunettes rondes, un costume, une chemise rayée et une cravate, souriant et tenant ses mains ensemble.
Un portrait en dessin au crayon d'un homme âgé portant des lunettes, en costume avec nœud papillon, assis dans une pièce élégante, avec un tableau abstrait en arrière-plan.

Présentation des quatre ouvrages

Il m’a semblé nécessaire de créer un espace où puisse se retrouver, de manière ordonnée et lisible, l’ensemble des éléments éditoriaux relatifs à mon travail.

C’est la présentation de quatre ouvrages, que je souhaite ici soumettre à votre lecture.

Ils sont le fruit de mon parcours au sein de l’Association Freudienne Internationale, puis de l’Association Lacanienne Internationale pendant ces trente dernières années.

Avec le temps justement, le désir de transmettre c’est dénoué. Il m’a alors semblé nécessaire de rassembler et d’ordonner ces textes afin d’en offrir l’essentiel sous une forme accessible à tous ceux que la pensée freudienne et lacanienne continue d’animer.

 Ce travail de mise en forme a conduit, en 2025, à la publication de quatre volumes :

•        "La formation du patient – Freud Lacan”

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•         “Lacan pour les patients”

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•       “Séminaires de Jacques Lacan, Tome I (1953–1964) – Citations, Interprétations et Commentaires”

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 •     “Séminaires de Jacques Lacan, Tome II (1965–1980) – Citations, Interprétations et Commentaires”

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Chacun de ces livres ne se réduit pas à un simple recueil de textes. Ils cherchent à traverser les concepts, à questionner les héritages, et à éclairer sous un jour neuf l’articulation entre théorie et pratique psychanalytique.

Mon intention, aujourd’hui, est de partager ces travaux, de leur permettre de rencontrer leurs lecteurs, de susciter de nouveaux élans de recherche et de pensée.

De chacun de ces ouvrages, j’ai choisi des courts extraits pour ce site, une présentation spécifique, et un lien internet direct, afin d’en permettre de les trouver facilement.

Je vous invite à parcourir cet ensemble avec curiosité, dans l’espoir que vous y trouverez matière à réflexion et résonance avec vos propres questionnements.

 

Extraits de

“La formation du patient”

« Premiers pas »

 

Sigmund Freud - Jacques Lacan

 

 

 

Sauf une exception remarquable, il n’existe pas de praticien dans cette discipline

qui n’a pas été patient auparavant

 

 

Note préliminaire 

 

Ce livre est destiné principalement aux patients. En effet, je souhaite répondre aux questions qui viennent à l’analysant au quotidien, aux interrogations qui apparaissent pendant la cure, celles que le patient se pose au sujet de notre clinique au moment même où elle est pratiquée.

Évitant les lourdeurs pour le novice tout en tentant de le stimuler pour qu’il découvre le savoir qui est le sien et que pourtant il ignore pour le moment, cet écrit est destiné à répondre aux principales questions, aux doutes ou lacunes des patients sur la théorie de la cure qu’ils sont en train de mener.

J’ai choisi de faire de ce livre un instrument de transmission. Cela a été réalisé en pensant que le travail du patient n’est jamais limité si un désir nouveau surgit pendant la cure. Un désir de savoir qui produira un déplacement subjectif vers une position nouvelle et enthousiaste dans la vie du sujet. Je parle concrètement du desir de devenir psychanalyste à son tour.

 

Présentation des Chapitres 

  

Chapitre 1 : L’existence de l’inconscient. Les sources théoriques et cliniques de Sigmund Freud

Ce premier chapitre introduira le lecteur à la notion d’inconscient. Nous examinerons les influences philosophiques, médicales et littéraires qui ont inspiré Freud. Ce qui inclut les travaux de Charcot sur l’hystérie, l’influence de Breuer et le passage de la méthode cathartique à l’association libre. Nous mettrons en lumière la façon dont ces différentes sources ont contribué à l’émergence de la théorie freudienne. 

 

Chapitre 2 : Ce qui échappe à notre conscience. De quelle façon la cure analytique permet d’y avoir accès

Dans ce chapitre, nous explorons la manière dont l’inconscient se manifeste dans la vie quotidienne à travers les rêves, les lapsus, les oublis... En soulignant les techniques analytiques développées par Freud et Lacan, nous expliquons ensuite comment la psychanalyse permet d’accéder aux contenus cachés en les faisant émerger à la conscience. Ce chapitre illustrera de quelle manière ces phénomènes, bien qu’apparemment banals, révèlent des aspects profondément enfouis de la psyché. 

 

Chapitre 3 : Jacques Lacan, son parcours, son enseignement

 Lacan est une figure clé dans l’histoire de la psychanalyse. Ce chapitre retracera les grandes étapes de son enseignement, de son retour à Freud, des personnalités qui l’ont influencé, jusqu’à ses innovations théoriques. 

 

Chapitre 4 : Découvertes freudiennes

Qu’est-ce que le rêve ?

Chaque rêve est une porte d’entrée privilégiée vers l’inconscient. Ce chapitre décrira les différentes théories du rêve élaborées par Freud, en particulier l’idée que le rêve est une réalisation déguisée d’un désir refoulé. Nous explorerons aussi les différences et les similitudes de l’approche de Lacan. 

 

Chapitre 5 : Le développement psychosexuel

Les stades du développement psychosexuel décrits par Freud retracent l’évolution de l’être humain dès la naissance. Chaque stade est caractérisé par l’investissement libidinal d’une zone érogène spécifique et par des conflits potentiels qui peuvent, s'ils ne sont pas résolus, influencer le développement psychologique de l'individu.

Chapitre 6  : Le complexe d'Œdipe : théories freudiennes et perspectives lacaniennes

Le complexe d'Œdipe est un concept central de la psychanalyse, développé par Freud et réinterprété par Lacan. Cette théorie décrit une étape cruciale du développement psychosexuel de l'enfant, ainsi que son influence durable sur la structuration de la personnalité et les relations sociales.

Chapitre 7 : Les grandes organisations psychiques : psychoses, névroses et perversions

Ce chapitre offrira une analyse détaillée des principales organisations psychiques : la psychose, la névrose et la perversion. Nous montrerons comment ces structures se manifestent et sont diagnostiquées en psychanalyse.

 

Chapitre 8 : Le diagnostic en psychanalyse

Nous discuterons ici de la spécificité du diagnostic en psychanalyse, qui diffère des approches médicales traditionnelles. Nous expliquerons avec des exemples les méthodes et les outils utilisés par les psychanalystes pour établir un diagnostic. 

 

Chapitre 9 : L’importance du langage dans notre vie psychique

Lacan a révolutionné la psychanalyse en plaçant le langage au centre de la vie psychique. Ce chapitre explorera l’idée que l’inconscient est structuré comme un langage et discutera l’importance des signifiants dans le processus analytique. 

 

Chapitre 10 : La demande d'analyse. Désir de savoir du patient. Le motif initial du patient et la formulation de la demande d’analyse

Ici, nous explorerons comment ce désir initial, souvent inconscient, pousse le patient à formuler une demande d’analyse. Nous discuterons des enjeux de cette demande et de sa place dans le processus thérapeutique. 

 

Chapitre 11 : La relation transférentielle entre le thérapeute et le patient. L’amour de transfert

La relation transférentielle est au cœur de la cure psychanalytique. Ce chapitre expliquera le concept de transfert, sa dynamique, son importance pour le traitement et en particulier l’amour de transfert. 

 

 Chapitre 12 : Le cadre psychanalytique. 

Le déroulement des séances

 

Le déroulement des séances de psychanalyse constitue un pilier de la pratique psychanalytique. La structure des séances, les règles du cadre analytique et les interventions spécifiques de l'analyste permettent l'exploration des dynamiques inconscientes. Ce processus, à la fois structuré et fluide, reflète l’histoire et les évolutions de la psychanalyse, depuis les fondements freudiens jusqu’aux innovations lacaniennes.

  

Chapitre 13 : L’importance de la temporalité durant le traitement.

La “construction” dans la cure

Ce chapitre détaillera l’organisation temporelle du traitement analytique, en se concentrant sur le concept de “construction” tel que défini par Freud. Nous verrons comment le temps joue un rôle essentiel dans la révélation et la reconstruction des éléments inconscients. 

 

Chapitre 14 : L’évolution du patient 

Ce chapitre traitera des différentes phases du traitement psychanalytique et de l’évolution du patient au fil des séances. Nous examinerons les critères de progrès en psychanalyse et les signes d’évolution. 

 

Chapitre 15 : Présentation de cas

La pratique de la présentation de cas a survécu et continue d’être utilisée dans diverses institutions psychanalytiques et psychiatriques, ainsi que dans les écoles de formation pour les analystes. Elle est souvent employée comme outil pédagogique.

 

Chapitre 16 : La fin de la cure 

Ce chapitre abordera la question complexe de la fin de la cure psychanalytique. Nous examinerons les critères qui permettent de déterminer qu’une analyse est terminée, que les conflits psychiques sont résolus, et comment la fin de la cure est vécue par le patient et l’analyste. Ce chapitre explorera également les différentes théories sur la fin de l’analyse, notamment celles de Freud et de Lacan. 

 

Annexes :

 

1.- Sigmund Freud

Il m’est apparu important, avant de finir l’écriture de cet ouvrage, de revenir, de façon plus narrative peut-être, sur la vie et l'œuvre du fondateur Sigmund Freud.

2.- Glossaire Jacques Lacan

Après relecture de textes qui se réfèrent à Jacques Lacan dans cette étude, (je pense à tous ceux qui l’abordent pour la première fois), la nécessité d’un glossaire m’est apparue évidente. J’espère arriver à donner un aperçu de la profondeur et de la richesse de sa pensée.  

3.- Les psychanalystes en Europe et en Amérique Latine qui ont fait évoluer la discipline à différentes époques

     Dans cette dernière annexe, nous retracerons l’évolution de la psychanalyse au travers du travail d’éminents psychanalystes en Europe et en Amérique Latine. Nous présenterons leurs contributions spécifiques, leurs personnalités, et la façon dont ils ont influencé la pratique psychanalytique dans leurs régions respectives. Seront abordés les travaux de figures de la psychanalyse anglaise tels que Mélanie Klein, Donald Winnicott en Europe, ainsi que ceux d’Angel Garma, Oscar Masotta et Marie Langer en Amérique latine. 

Lien Internet:

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Couverture du livre intitulé 'La formation du Patient' par Marcelo Garguio, avec un fond à motif géométrique en vert et or.

 

Extraits de:

Lacan pour les patients

Note préliminaire

Ce livre est destiné à répondre aux questions que le patient se pose au sujet de Lacan, le psychanalyste français qui a tant apporté à la discipline que nous pratiquons. Son œuvre, à travers ses séminaires, ses concepts, ses conférences, sera ici présentée de la façon la plus agréable à lire et facile à suivre possible.

M’efforçant d’éviter les lourdeurs pour le novice, tout en essayant de stimuler son envie de savoir, j’ai choisi de faire de ce livre un instrument de transmission. Je l’ai donc écrit en pensant que le travail du patient n’est jamais limité, un désir nouveau pouvant toujours apparaître pendant la cure, un désir de connaissance, qui produira un déplacement subjectif vers une position nouvelle et enthousiasmante dans la vie du sujet. Je parle très précisément du désir de devenir à son tour psychanalyste.

 

Pour les plus avancés, j’ai introduit au dernier chapitre (pag. 400) des citations de textes de Lacan, mes interprétations et commentaires.                       

 

Les concepts nécessaires:  Avant de nous confronter avec des chapitres plus précis, commençons par nous familiariser avec un nouveau vocabulaire. Lacan a développé une théorie psychana­lytique riche et complexe, fondée sur des concepts innovants et souvent déroutants. Sa pensée s’appuie sur une terminologie propre, parfois empruntée à d’autres disciplines comme la linguistique, la topologie ou la philosophie, mais toujours remaniée de manière à éclairer la structure de l’inconscient et la dynamique du désir. Comprendre Lacan nécessite donc de se familiariser avec cette langue conceptuelle unique, où chaque terme joue un rôle précis dans l’articulation de sa théorie.

Définir et expliciter la terminologie lacanienne m’est donc apparu indispensable, pour plusieurs raisons. D’abord, Lacan réinterprète des concepts issus d’autres disciplines, tels ceux du signifiant ou de la métonymie, et leur donne une signification nouvelle dans le contexte de la psychanalyse. Ensuite, il invente des termes originaux, par exemple le « sinthome » ou le « trait unaire », qui n’ont de sens que dans le cadre spécifique de sa réflexion. Enfin, la terminologie lacanienne est profondément liée à la structure et à la logique de sa théorie : chaque mot, chaque concept est imbriqué dans une chaîne de signifiants qui dévoile peu à peu la complexité de l’inconscient.

Cela permettra de démêler cette complexité, de clarifier les notions clés, et offrira au lecteur un accès plus fluide à l’univers théorique de Lacan. L’ouvrage ne se veut pas seulement un outil de référence, mais un guide pour explorer et comprendre comment Lacan articule les registres du réel, du symbolique et de l’imaginaire, comment il repense le désir, la jouissance, ou encore le sujet dans son rapport à l’Autre. En ce sens, cette partie consacrée au lexique lacanien devient un passage que je crois nécessaire pour appréhender la psychanalyse lacanienne dans toute sa richesse et sa subtilité.

Note au sujet des répétitions

Tout au long de cette première grande partie, le lecteur pourra relever des répétitions conceptuelles, parfois fréquentes, au sein des différents paragraphes. Il m’est apparu nécessaire de préserver cette dynamique afin de faire ressentir que, à l’image des séances psychanalytiques, répéter sans préjugé ni contrainte littéraire les idées qui se présentent dans le discours fait partie du processus d’assimilation des concepts.

 

 

Table des matières

Les concepts nécessaires

1. L’algèbre lacanienne

Une formalisation de l’inconscient

Le S1 et le S2 : signifiants et structuration du sujet

Le mathème : une synthèse universelle du concept psychanalytique

Graphes et schémas

2. Approche de la psychose

Comprendre la forclusion et ses conséquences

Le Nom-du-père

La schizophrénie

Références bibliographiques

3. Le grand Autre

Le grand Autre comme ordre symbolique

Le grand Autre comme instance de la loi et de l’autorité

Le grand Autre et le langage

Le grand Autre et le désir

Le grand Autre dans la relation à l’inconscient

Le grand Autre n’est pas une personne

Le grand Autre, un lieu préexistant

Le psychanalyste comme grand Autre

Le grand Autre et la dimension inconnaissable

Exemple pour illustrer le grand Autre

Références bibliographiques

4. Besoin, désir, demande

Une exploration des motivations humaines

Le besoin : ce qui relève du corps

Le désir

La demande : la voix du besoin à travers le langage

La distinction besoin-désir-demande : une clé pour comprendre la psyché humaine

Références bibliographiques

5. Extimité

Quand l’intime rencontre l’extérieur

Une intimité toujours traversée par l’Autre

Les symptômes

L’intériorité comme produit de l’extériorité

Extimité et modernité : la culture des réseaux sociaux

Extimité et subjectivité

Le ruban de Möbius

Références bibliographiques

6. La forclusion

Une clé pour comprendre la psychose

La forclusion et le Nom-du-père : la loi paternelle non inscrite

Références bibliographiques

7. La jouissance

Entre plaisir, excès et réel

Le principe de plaisir versus la jouissance

Jouissance et transgression : un rapport au réel

La jouissance phallique : une jouissance symboliquement encadrée

La jouissance Autre : une jouissance au-delà du phallus

Jouissance et désir : le moteur de la confrontation avec l’impossible

La jouissance comme dépassement du symbolique

Références bibliographiques

8. Le lien social

Quatre discours pour comprendre les relations humaines

Les quatre discours fondamentaux

Les discours et le lien social

Le lien social comme système de discours

Références bibliographiques

9. Le manque

Une condition fondamentale du désir et de la subjectivité

Le premier manque : la séparation d’avec la mère

L’accès au langage : une coupure avec la jouissance originaire

L’objet a : symbole du manque et cause du désir

Le manque et la dynamique du désir : une quête infinie

Le manque et les relations à l’autre

Le manque, une condition de la subjectivité

Références bibliographiques

10. Le mathème

Une formalisation rigoureuse de la psychanalyse

Le mathème : tentative d’une transmission universelle

Le graphe du désir : une formalisation de la dynamique du désir

Le mathème de la métaphore paternelle : la loi symbolique et la castration

L’intérêt des mathèmes : rigueur, transmission et universalité

Mathèmes et limites du langage naturel

Le mathème comme outil d’objectivation de la psychanalyse

Références bibliographiques

11. La métaphore

Substitution, signifiants et structuration du désir

La métaphore en linguistique et en psychanalyse

La métaphore paternelle : un exemple central

La métaphore et la structuration du sujet

La métaphore dans les symptômes névrotiques

La métaphore et l’ordre symbolique

Références bibliographiques

12. La métonymie

Le mouvement infini du désir

Métonymie en linguistique et en psychanalyse

La métonymie comme expression du désir insatiable

Le désir comme déplacement métonymique

La métonymie et le symbolique

Références bibliographiques

13. L’objet a : cause du désir et énigme fondamentale

L’objet a et la perte originelle

L’objet a : une cause insaisissable du désir

Objet a et jouissance

L’objet a et les fantasmes

L’objet a et la structure du sujet

L’objet a comme point de fuite du désir

Références bibliographiques

14. La passe

Le passage de l’analysant à l’analyste

L’analyse selon Lacan : plus qu’une simple disparition des symptômes

La passe : témoigner de la fin de l’analyse

La transformation intérieure et l’acte de s’autoriser

La passe et la transmission

Le statut de la passe dans l’école de Lacan

La fin de l’analyse et l’autorisation à devenir analyste

La passe comme acte de transmission et de transformation

Références bibliographiques

15. Le petit autre

Reflet imaginaire et dynamique de la relation narcissique

Le petit autre et le stade du miroir

Le petit autre et les relations narcissiques

Illusion de complétude et division du sujet

Petit autre et grand Autre : imaginaire et symbolique

Le petit autre comme miroir de l’illusion narcissique

Références bibliographiques

16. La réalité psychique

Construction symbolique et désir

Réalité psychique et ordre symbolique

Le décalage entre réalité psychique et réalité objective

La réalité psychique structurée par l’inconscient

Réalité psychique, manque et fantasme

Conflit entre réalité psychique et réalité extérieure

La réalité psychique comme construction symbolique

Références bibliographiques

17. Réel, symbolique et imaginaire

Le réel : l’impossible à symboliser

Le symbolique : le langage, la loi et l’ordre des signifiants

L’imaginaire : le monde des images et des illusions

Interaction entre le réel, le symbolique et l’imaginaire

Les trois registres comme fondement de la subjectivité

Références bibliographiques

18. Le regard

Objet a, altérité et jouissance

Le regard comme objet a

Voir et être vu : la relation à l’autre

Le regard et la jouissance

La part d’invisible dans l’acte de voir

Le regard dans la relation analytique

Le regard comme point de rencontre entre désir et altérité

Références bibliographiques

19. Le ruban de Möbius

Construire un ruban de Möbius

Caractéristiques du ruban de Möbius

Topologie et psyché

Le ruban de Möbius et la continuité entre intériorité et extériorité

Intériorité psychique et extériorité sociale

Le ruban de Möbius et la complexité du sujet

Le ruban de Möbius comme métaphore de la psyché complexe

Références bibliographiques

20. S’autoriser de soi-même et de quelques autres

L’autorisation de l’analyste

Autorisation personnelle : une décision intime

L’importance de « quelques autres » : transmission et reconnaissance

Autorisation et responsabilité : une expérience subjective

Une double exigence : autonomie et reconnaissance collective

La dimension éthique de l’autorisation

Références bibliographiques

21. Le schéma L

Représentation des relations intersubjectives

Les composantes du schéma L

Les relations entre les composantes

Méconnaissance et désir

Le schéma L comme outil de lecture des relations psychiques

Références bibliographiques

22. Le signifiant

Structure inconsciente et désir

Le signifiant comme unité fondamentale de la structure symbolique

Le signifiant et la chaîne signifiante : le déplacement du sens

Le signifiant, le désir et l’Autre

Le signifiant maître et le sujet divisé

Le travail de l’analyse : déchiffrer la chaîne signifiante

Le signifiant comme outil fondamental de la psychanalyse

Références bibliographiques

23. Le sinthome

Une structure au-delà du symptôme

Sinthome et symptôme : une transformation conceptuelle

James Joyce, un exemple de sinthome

Sinthome et jouissance

Sinthome et structuration du sujet

Le sinthome comme création singulière

Références bibliographiques

24. Le stade du miroir

Naissance du moi imaginaire

La découverte de l’image spéculaire : une illusion de complétude

Le moi imaginaire : une illusion fondée sur la méconnaissance

Identification, rivalité et narcissisme

Le stade du miroir : entre imaginaire et symbolique

Conséquences du stade du miroir dans la vie psychique

Le stade du miroir comme fondation de la subjectivité

Références bibliographiques

25. Le sujet

Division, langage et manque

Le sujet et le langage : une division inévitable

Le sujet et l’Autre : une position structurée

Division du sujet : le sujet barré et l’inconscient

Le manque comme structure fondamentale

Le sujet de l’inconscient : l’absence de maîtrise

Le sujet comme quête inachevée

Références bibliographiques

26. Le trait unaire

Marque symbolique et constitution du sujet

Identité et différence

La fixation du désir

La différence et le désir

La marque symbolique et le manque

Une marque dans la subjectivité

Références bibliographiques

II. Les Séminaires

Introduction

Les premières années : le retour à Freud (1953‑1958)

L’élaboration des structures fondamentales (1958‑1964)

La logique des discours et la topologie (1969‑1974)

La fin de l’enseignement et le sinthome (1975‑1980)

1. Les Écrits techniques de Freud (1953-1954)

Le contexte

Le séminaire

2. Le Moi dans la théorie de Freud et dans la technique de la psychanalyse (1954-1955)

Le contexte

Le séminaire

3. Les Psychoses (1955-1956)

Le contexte

Le séminaire

4. La relation d’objet (1956-1957)

Le contexte

Le séminaire

5. Les formations de l’inconscient (1957-1958)

Le contexte

Le séminaire

6. Le désir et son interprétation (1958-1959)

Le contexte

Le séminaire

7. L’éthique de la psychanalyse (1959-1960)

Le contexte

Le séminaire

8. Le transfert (1960-1961)

Le contexte

Le séminaire

Conséquences pour les séminaires qui suivront

9. L’identification (1961-1962)

Le contexte

Le séminaire

10. L’angoisse (1962-1963)

Le contexte

Le séminaire

11. Les Noms-du-père (1963)

Le contexte

Le séminaire

12. Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse (1964)

Le contexte

Le séminaire

13. Problèmes cruciaux pour la psychanalyse (1964-1965)

Le contexte

Le séminaire

14. L’objet de la psychanalyse (1965-1966)

Le contexte

Le séminaire

15. La logique du fantasme (1966-1967)

Le contexte

Le séminaire

16. L’acte psychanalytique (1967-1968)

Le contexte

Le séminaire

En résumé

17. D’un Autre à l’autre (1968-1969)

Le contexte

Le séminaire

18. L’envers de la psychanalyse (1969-1970)

Le contexte

Le séminaire

19. D’un discours qui ne serait pas du semblant (1970-1971)

Le contexte

Le séminaire

20. … ou pire (1971-1972)

Le contexte

Le séminaire

21. Le savoir du psychanalyste (1971-1972)

Le séminaire

22. Encore (1972-1973)

Le contexte

Le séminaire

23. Les non-dupes errent (1973-1974)

Le contexte

Le séminaire

24. RSI (1974-1975)

Le contexte

Le séminaire

25. Le sinthome (1975-1976)

Le contexte

Le séminaire

26. L’insu que sait de l’une-bévue s’aile à mourre (1976-1977)

Le contexte

Le séminaire

27. Le moment de conclure (1977-1978)

Le contexte

Le séminaire

28. La topologie et le temps (1978-1979)

Le contexte

Le séminaire

En résumé

29. Dissolution (1979-1980)

Le contexte

Le séminaire

III. Conférences et textes prononcés par Jacques Lacan en dehors de ses séminaires

1. Le discours de Rome (1953)

Les trois registres : réel, symbolique, imaginaire

Le retour à Freud

Introduction du signifiant et du signifié

Importance du discours de Rome

Une parole adressée à la demande de savoir :

L’énigme de l’action analytique : entre parole et vérité :

L’épreuve de la parole : entre responsabilité et inconscience

La parole pleine et la reconnaissance du sujet :

Le langage, fondement de l’inconscient et de l’identité subjective :

Le retour du refoulé, le désir et la reconnaissance :

L’histoire, la répétition et la vérité :

Le langage comme matière du refoulé et condition de l’inconscient :

Histoire, structure et temporalité du sujet analysant :

Le transfert comme élaboration de l’histoire :

L’ordre symbolique, champ propre de la psychanalyse :

La lettre et l’ambiguïté du langage :

Le symptôme comme texte à lire : plurivocité et structure :

La surdétermination freudienne : structure du signifiant et équivoque causale :

Le langage ne peut être traité comme objet :

Le symptôme, non objet mais signifiant dans un discours :

La parole, et non la conscience, comme vecteur du passage analytique :

L’ambiguïté fondamentale de la parole et le statut du symptôme :

Surdétermination, plurivalence et causalité dans le langage :

2. La chose freudienne ou Sens du retour à Freud en psychanalyse (1955)

Contexte de la conférence

Objectifs du discours

La chose freudienne

La dette du sujet : envers Freud, envers la parole

3. La direction de la cure et les principes de son pouvoir (1958)

Contexte de la conférence

Impact et postérité

Principes de la direction de la cure, transfert et désir de l’analyste

Le pouvoir de la cure

Critique des pratiques psychanalytiques contemporaines

4. Radiophonie (1970)

Contexte social et culturel

Points clés

5. Lituraterre (1971)

Contexte intellectuel et culturel

Pour qui Lacan écrit-il « Lituraterre » ?

Langage et inconscient

Implications pour la psychanalyse

6. L’étourdit (1972)

Un moment de recentrage sur le langage et le discours

Concepts clés introduits

Le style de Lacan

Implications cliniques

Ce texte, rédigé en 1972, est édité pour la première fois dans le numéro 4 de la revue Scilicet, puis réédité dans le recueil Autres écrits (Seuil, 2001).

Axes de lecture et résonances

Résonances cliniques, topologiques et politiques

7. Télévision (1974)

Contexte intellectuel et social

L’émission

Concepts clés abordés

Le style de Lacan

8. Conférence à l’université de Milan (1972)

Contexte de la conférence

Organisation de la conférence

Thèmes abordés

L’importance de la conférence

Le sujet, l’objet a, et le destin du discours analytique 

9. Conférence de Louvain (1972)

Contexte de la conférence

Les thèmes abordés

Provocations et réflexion

10. Conférence de Genève sur le symptôme (1975)

Contexte de la conférence

Thèmes abordés

Bibliographie

Lien Internet :

https://amzn.eu/d/7mEvMTo 

Couverture de livre bleue avec le titre 'Lacan pour les Patients' écrit en blanc, auteur Marcelo Gargiulo, fond à motif géométrique. Chacun des textes est en français.

Extraits de:

“Séminaires de Jacques Lacan Tome I

1953 – 1964

 Citations, Interprétations et Commentaires”

 

 Avant-propos 

Le présent ouvrage naît d’un pari : celui d’offrir un accès quotidien à la pensée de Lacan, en extrayant de chacune des séances de son Séminaire une phrase, une formule, un énoncé susceptible de condenser la portée, le tranchant, ou l’intuition fulgurante de l’auteur ce jour-là. Il ne s’agit pas de réduire le Séminaire à des aphorismes. Bien au contraire : chaque citation est replacée dans sa dynamique, son contexte, son temps logique, et suivie d’un commentaire analytique, rédigé dans une langue claire, littéraire, mais jamais simplificatrice.

Ce livre peut se lire comme une traversée. Il propose une lecture rythmée par les dates réelles des séances, où le lecteur circule à travers les inflexions majeures de l’enseignement lacanien : le retour à Freud, la topologie des registres, la formalisation des discours, la fonction du réel, le désir de l’analyste, la lettre, le symptôme.

Il s’adresse à ceux qui s’intéressent à la psychanalyse, à ceux qui l’étudient, à ceux qui la pratiquent. Mais il s’adresse aussi à ceux qui n’ont jamais ouvert un Séminaire de Lacan mais qui pressentent qu’une pensée vivante, exigeante et précieuse y circule encore. Il ne vise ni l’exhaustivité ni l’érudition, mais la transmission, au sens fort du terme : faire passer une étincelle de ce qui a été pensé, dit, formulé, au cœur du lien analytique.

Cet ouvrage ne remplace pas la fréquentation directe des Séminaires. Il la prépare, il l’accompagne, il la relance. Il ne fait pas écran : il ouvre une porte. Chaque phrase de Lacan, dans sa torsion propre, dans sa structure parfois déroutante, porte en elle une logique, une mise en jeu du sujet, une découpe dans le savoir. Notre travail a consisté à écouter ces phrases, à en respecter la coupure, à en tirer un enseignement, non pas pour clore, mais pour faire place à ce qui insiste et demande à se dire.

J’ai sélectionné, à raison d’une phrase par semaine de Séminaire, et cela pendant les vingt-cinq ans de sa duration, le matériel que dans ce livre tente de condenser l’enjeu.

Il ne s’agit pas d’un résumé ni d’une anthologie. Ce qui est proposé ici est une lecture. Une lecture orientée, rigoureuse, nourrie par l’expérience clinique, les textes, les Séminaires, et les nécessités de la transmission.

 J’ai voulu que chaque citation de Lacan, soit suivie d’un commentaire qui ne s’adresse ni à l’initié seul ni au grand public indistinctement, mais à ce lecteur que j’imagine au travail : praticien, chercheur, étudiant, ou simplement lecteur attentif, qui cherche non à être convaincu mais à être suscité. Car si Lacan continue de parler, c’est précisément parce qu’il ne dit jamais tout. Il laisse place à l’interprétation, c’est-à-dire à l’acte même de lire.

Ce livre est donc un legs de Lacan , au sens le plus simple et le plus engagé du terme : un legs à lire, à penser, un legs à transmettre. Qu’il puisse, je l’espère, accompagner d’autres lecteurs dans leur propre parcours, dans leur propre écoute , et peut-être, à leur tour, dans leur propre enseignement.

Introduction

Il est des œuvres dont la lecture s’impose comme une traversée, mais dont la cohérence se dérobe à l’inventaire. L’enseignement de Jacques Lacan appartient à cette catégorie. Pendant un quart de siècle, de 1953 à 1980, Lacan a tenu chaque année un Séminaire public, lieu de parole, de rigueur et de déplacement. Son Séminaire n’est pas un « cours » au sens universitaire du terme. C’est une adresse, un travail en acte, une élaboration du savoir à partir de ce que la psychanalyse rencontre de plus vif : le symptôme, la jouissance, le langage, le transfert.

Il ne s’agit pas ici d’un florilège ni d’un recueil d’aphorismes. Chaque citation a été choisie non pour sa brillance rhétorique, mais pour ce qu’elle ouvre : un angle de lecture, une tension théorique, un point de bascule. Le commentaire qui suit n’est ni vulgarisation ni exégèse ; il est une tentative d’interprétation. Il s’inscrit dans une pratique rigoureuse de lecture.

 En procédant ainsi, semaine après semaine, année après année, j’ai tenté de dessiner une cartographie condensée du Séminaire. Non pas exhaustive, mais signifiante. Elle offre au lecteur un accès singulier à la pensée de Lacan, en respectant à la fois son mouvement propre, sa complexité, et sa temporalité.

 Ce livre s’adresse à ceux pour qui la psychanalyse n’est pas seulement une référence, mais un champ d’expérience. À ceux qui, pratiquants ou lecteurs, savent que lire Lacan ne consiste pas à chercher des certitudes, mais à se risquer à la coupure. Et si, parfois, le fil du commentaire semble osciller ou se heurter à l’opacité d’une formulation, c’est que Lacan ne parlait jamais pour transmettre un savoir clos, mais pour ouvrir un travail.

Ce recueil est donc un outil. Un fil rouge pour les lecteurs du Séminaire. Une boussole pour les praticiens. Et, espérons-le, une invitation renouvelée à entendre ce que Lacan appelait, avec une sobriété qui n’était jamais sans ironie : la discipline.

Table de Matières

 

AVANT-PROPOS

INTRODUCTION

RUE DE LILLE, LE CERCLE INITIATIQUE

Étude des Séminaires

« LES ÉCRITS TECHNIQUES DE FREUD »

LA TECHNIQUE DE LA PSYCHANALYSE »

« LES PSYCHOSES »

« LA RELATION D'OBJET »

« LA DIRECTION DE LA CURE ET LES PRINCIPES DE SON POUVOIR »

« LES FORMATIONS DE L'INCONSCIENT »

« L'ÉTHIQUE DE LA PSYCHANALYSE »

« LE TRANSFERT »

« L'IDENTIFICATION »

« L'ANGOISSE »

« LES NOMS-DU-PÈRE »

« LES QUATRE CONCEPTS FONDAMENTAUX DE LA PSYCHANALYSE »

 

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Couverture d'un livre intitulé 'Séminaires de Jacques Lacan I: Citations, Interprétations et Commentaires 1953-1964' de Marcelo Gargiulo, avec un fond gris à motifs géométriques
Jacques Lacan devant un tableau noir, écrivant avec une craie sur la psychanalyse.

Extraits de:

« Séminaires de Jacques Lacan

 Tome II

1964 – 1980

Citations, Interprétations et Commentaires»

 

Avant-propos

 

L’ouvrage que voici naît d’une fréquentation assidue des Séminaires de Jacques Lacan, et s’inscrit dans la continuité d’un double engagement : celui d’un enseignement adressé, et celui d’une pratique clinique où l’on vérifie, séance après séance, que le savoir n’est rien s’il ne se soutient d’un dire.

Ce projet est né d’un pari aussi simple que redoutable : faire émerger, pour chaque séance du Séminaire , de 1953 à 1980, une phrase. Une seule. Une phrase dont le tranchant dépasse la circonstance, dont la portée ne s’épuise pas dans le contexte. Ce n’est donc ni une anthologie, ni un recueil de formules célèbres. C’est une lecture orientée. Une écoute.

Ce commentaire n’est ni exégèse, ni simplification. Il est une tentative de lecture, au sens fort du terme : un travail d’écoute, de déplacement, de rigueur. Il s’adresse à ceux pour qui la psychanalyse est un champ d’expérience — ceux qui savent qu’on ne lit pas Lacan pour comprendre, mais pour être pris dans un mouvement.

L’enseignement de Lacan ne se donne pas comme un corps de doctrines, mais comme une topologie en mouvement, une parole qui coupe, qui tord, qui insiste. Son oralité, loin d’en amoindrir la rigueur, en est la condition même. Car il s’agit d’un dire et non d’un savoir déjà là. C’est pourquoi ce livre s’appuie sur l’hypothèse que certaines phrases, certaines coupures, certains éclats, condensent une vérité qui n’est accessible qu’à condition d’être reprise, retravaillée, relue.

Chaque citation ici extraite est suivie d’un commentaire exigeant, nourri d’une lecture croisée des Séminaires, des Écrits de Lacan , de textes de Freud, et des travaux critiques les plus solides de notre époque. La méthode est simple, mais sans concession : rester fidèle à la lettre, tout en faisant entendre la logique qui s’y enroule , et parfois, s’y dérobe.

Ce livre ne cherche pas à vulgariser la psychanalyse. Il vise à la transmettre. Cela suppose de maintenir la tension entre clarté et opacité, entre concept et énigme, entre le mot et le réel qu’il vise sans jamais l’épuiser.

Une lecture qui s’adresse à un lecteur vivant : ni grand public indistinct, ni initié retranché, mais ce sujet au travail, analysant, analyste, étudiant pourquoi pas, ou lecteur attentif, pour qui lire Lacan, ce n’est pas s’assurer, c’est s’ouvrir.

Ce livre est donc un fil. Un fil rouge dans l’épaisseur du Séminaire. Une boussole, peut-être, pour qui cherche non à s’orienter à tout prix, mais à apprendre à se perdre.

Il y aura des résistances, des phrases opaques, des échappées. C’est le prix , et la condition, de cette traversée. Mais c’est dans ces ratés, ces relances, ces achoppements, que peut surgir un savoir autre : un savoir non clos, non plein, mais échafaudé, pétri, élaboré.

À ceux qui s’y risqueront, je dis ceci : laissez les phrases vous travailler. Acceptez de ne pas tout comprendre.

Car c’est là, sans doute, que Lacan continue de nous parler. Car Lacan, précisément, ne ferme rien. Il laisse la place à une relance et c’est cette ouverture que j’ai voulu transmettre ici, dans un livre qui n’est ni une fin, ni un aboutissement, mais une invitation à reprendre le fil.

* Note au lecteur novice sur la manière d’aborder ce livre

- Ne vous arrêtez pas à l’opacité d’un paragraphe, ni à l’énigme d’une formule. Ce livre n’a pas été écrit pour livrer immédiatement toutes ses clés, mais pour accompagner un déplacement , celui du regard, du savoir, de l’ignorance elle-même.

Le véritable secret de sa lecture réside dans cette disposition singulière : ne cherchez pas à tout comprendre page après page. Laissez le texte travailler en vous. Acceptez que certaines zones vous échappent, qu’une phrase vous résiste. C’est dans cette traversée où l’on ne comprend pas tout que quelque chose opère. Je crois bien, dans ce livre, avoir réussi quelques énoncés dans ce sens.

Ce n’est qu’en atteignant la fin de l’ouvrage qu’un savoir inédit peut surgir : non pas un savoir total, mais une nouvelle forme d’intelligibilité, née du trajet accompli. Laissez donc les phrases tracer en vous un sillon : c’est ce sillon qui, à la fin, préparera l’émergence d’une compréhension plus profonde, et c’est elle qui vous accompagnera ensuite.

 

Table de Matières

Avant-propos

Étude des Séminaires

1964-1965: « Problèmes cruciaux pour la psychanalyse »

1965-1966 "L'objet de la psychanalyse"

1966-1967: « La logique du fantasme ».

1967-1968 : « L'acte psychanalytique »

1968-1969 : « D'un Autre à l’autre »

1969-1970 : "L'Envers de la psychanalyse"

1970-1971 : « D'un discours qui ne serait pas du semblant »

1971-1972 : « ... ou pire »

1972-1973 : « Encore »

1974-1975 : « RSI »

1975-1976 : « Le sinthome »

1976-1977 : « L’insu que sait de l’une-bévue s’aile à mourre »

1977-1978 : « Le moment de conclure »

1978-1979 : « La topologie et le temps »

1979-1980 : « Dissolution »

Bibliographie

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Couverture d'un livre intitulé "Séminaires de Jacques Lacan II : Citations, Interprétations et Commentaires 1964-1980" par Marcelo Gargiulo, avec un fond marron et un motif géométrique
Portrait de Jacques Lacan, psychanalyste,  qui repose sa tête sur sa main.

Extraits de:

“La formation du patient”

Sigmund Freud - Jacques Lacan

 

Genèse de la théorie de l’inconscient, son développement et son impact

L'inconscient est sans doute le concept le plus révolutionnaire de la psychanalyse, introduit par Sigmund Freud à la fin du XIXe siècle. Freud disait : « Le moi n’est pas maître dans sa propre maison » soulignant ainsi qu’il existe une part de la psyché qui échappe à la conscience et que le sujet n'est pas transparent à lui-même et n'est plus souverain. Ce chapitre explore la genèse de la théorie de l'inconscient, les sources philosophiques et scientifiques qui ont inspiré Freud, ainsi que l'impact durable de cette découverte sur la pensée occidentale.

 

Quelles sont les racines philosophiques et scientifiques du concept d’inconscient?

Au temps de Freud, l'idée que certaines parties de l'esprit échappent à la conscience n'était pas entièrement nouvelle. Des philosophes et des scientifiques avaient déjà esquissé des théories qui anticipaient certaines des idées freudiennes. Il est toutefois crucial de comprendre comment ces influences ont convergé pour constituer la base de ce que Freud a ensuite systématisé et formalisé sous le concept d’inconscient.

 

Philosophes précurseurs

 

Arthur Schopenhauer (1788-1860) est souvent considéré comme l'un des philosophes dont les idées ont fortement influencé Freud. Dans son œuvre majeure, "Le Monde comme volonté et comme représentation"(1818), il développe une vision du monde où la volonté joue un rôle central, préfigurant ainsi certaines idées qui seront reprises et approfondies plus tard par Freud.

Schopenhauer considère la volonté comme la force fondamentale et irrationnelle qui sous-tend toute la réalité, y compris la vie humaine. Selon lui, cette volonté est aveugle, impulsive et non consciente. Elle guide les actions humaines, mais échappe à la rationalité et à la conscience. Schopenhauer affirme que la conscience n'est qu'une surface, tandis que les vrais motifs de nos actions sont cachés dans les profondeurs de cette volonté irrationnelle.

Cette idée de la volonté comme force inconsciente préfigure ce que Freud conceptualisera plus tard comme le Ça, cette partie de l’appareil psychique qui contient les instincts primitifs et inconscients.

Pour Schopenhauer, la vie est essentiellement marquée par la souffrance, car la volonté cherche toujours à satisfaire des désirs sans fin, créant ainsi des conflits internes. Il n’utilise pas le terme "refoulement" tel que Freud l’entendra, mais il reconnaît que l'homme est souvent dominé par des désirs et des forces intérieures qu'il ne maîtrise pas pleinement. Il écrit également que l'individu ignore souvent les véritables motifs de ses actions, une idée qui sera fondamentale chez Freud, qui dit que les désirs inconscients refoulés influencent nos comportements.

Bien que Schopenhauer ne développe pas de théorie de l'inconscient au sens strict, ses idées sur la volonté irrationnelle et les forces qui échappent à la conscience ont clairement anticipé des aspects fondamentaux de la théorie freudienne de l'inconscient. Ses réflexions sur la nature profonde des motivations humaines et des désirs cachés ont ouvert la voie à une compréhension plus nuancée de la psyché humaine.

Friedrich Nietzsche (1844-1900) est un autre penseur influent, qui a également contribué à la conception freudienne de l'inconscient. Bien que l’auteur n'ait jamais utilisé ce terme directement, il développe des idées qui préfigurent en quelque sorte la notion d'inconscient telle qu'elle sera théorisée plus tard. Ses réflexions sur les instincts, les forces irrationnelles et les pulsions inconscientes de l'humain ont influencé la psychanalyse, bien que Nietzsche ne formalise pas ces concepts comme Freud le fera.

Nietzsche explore l'idée de "volonté de puissance" (en allemand, Wille zur Macht), une force fondamentale qui agit en dessous du niveau de la conscience, guidant les actions et les désirs humains. Il suggère que de nombreuses actions humaines sont motivées par des forces que nous ne contrôlons pas consciemment.

Nietzsche accorde une grande importance aux instincts et aux pulsions, qu'il considère comme des moteurs primordiaux de la vie humaine, souvent en conflit avec la raison et la conscience. Dans "Ainsi parlait Zarathoustra", par exemple, il parle de la nécessité d'accepter ces forces vitales, parfois irrationnelles, pour s'épanouir pleinement, à l'instar de Freud qui décrira plus tard les pulsions en tension avec le Surmoi.

Dans certains passages, Nietzsche traite de ce qui s'apparente au refoulement des instincts et des désirs. Il considère que la civilisation et la morale chrétienne, en particulier, répriment les pulsions naturelles de l'homme, créant des conflits internes. Cette idée de refoulement sera au cœur de la théorie freudienne de l'inconscient.

Dans "La Généalogie de la morale", Nietzsche expose une critique de la morale chrétienne, qu'il voit comme un mécanisme de refoulement des instincts vitaux. Bien qu'il n'utilise pas le terme "inconscient", il souligne que la moralité exerce un contrôle oppressif sur les instincts humains, les forçant à s'exprimer de manière détournée. Cela pourrait être considéré comme un parallèle avec la manière dont Freud envisage le rôle de l'inconscient dans la formation des symptômes névrotiques. 

Bien que Nietzsche n'ait pas formulé une théorie de l'inconscient aussi précise que celle de Freud, son œuvre contient des intuitions profondes sur les forces irrationnelles et invisibles qui sous-tendent la conscience humaine.

Nietzsche critique la vision rationaliste du sujet en soulignant l'importance des pulsions inconscientes (sans les nommer de cette façon) dans la formation de la culture, des valeurs et des comportements individuels. Il introduit les concepts du « dionysiaque » et de « l'apollinien », où le premier représente les forces chaotiques et irrationnelles de l'inconscient, opposées au second, symbole de la raison et de l'ordre. Freud reprendra cette dualité dans sa propre réflexion sur les conflits internes entre les désirs pulsionnels et les contraintes morales et sociales.

 

Médecins précurseurs

Les racines médicales du concept d'inconscient se trouvent dans les travaux des neurologues et psychologues du XIXe siècle, dont Jean-Martin Charcot et Pierre Janet, deux figures essentielles qui ont ouvert la voie à la pensée freudienne.

Jean-Martin Charcot (1825-1893) était un neurologue de renommée mondiale, qui dirigeait le service des maladies nerveuses à la Salpêtrière, où il étudiait principalement des patients hystériques. Freud, qui a étudié auprès de Charcot dans les années 1880, a été profondément influencé par ses démonstrations que certains symptômes hystériques pouvaient être provoqués et supprimés par suggestion hypnotique. Charcot montra ainsi que ces symptômes n'avaient pas de base organique mais étaient liés à des processus psychiques inconscients. Ce fut une révélation pour Freud, qui comprit que les maladies mentales pouvaient avoir des racines psychologiques plutôt que purement physiologiques. L’idée que des processus inconscients pouvaient se manifester physiquement à travers des symptômes hystériques était une idée révolutionnaire qui allait devenir centrale dans la théorie freudienne. Aux côtés de Charcot, Freud apprend que les malades hystériques n’étaient pas des simulateurs et que leurs troubles somatiques n’étaient pas le résultat de lésions organiques. Charcot parvient à reproduire expérimentalement les symptômes hystériques (les paralysies ou autre) en suggérant un traumatisme à ces patients plongés dans un sommeil hypnotique.

Pierre Janet (1859-1947) : Pierre Janet était un psychologue et philosophe français qui étudiait les troubles dissociatifs. Dans son œuvre “L'Automatisme psychologique” (1889), Janet a mis en évidence la manière dont des souvenirs traumatiques pouvaient se dissocier de la conscience et créer des "idées fixes", responsables de symptômes automatiques échappant au contrôle conscient. Janet parlait d'une sorte d'inconscient dissocié, distinct du concept freudien, mais ses idées ont contribué à l'élaboration des théories sur les mécanismes de défense et les processus psychiques inconscients. Bien que Janet et Freud aient divergé dans leurs théories, le travail de Janet sur les idées fixes et la dissociation a ouvert des perspectives importantes sur la façon dont des expériences inconscientes peuvent influencer le comportement et provoquer des troubles psychiques.

 

La découverte freudienne de l’inconscient

Le cheminement qui a conduit Freud à la découverte et à la formalisation du concept d'inconscient a été marqué par une série de développements cliniques et théoriques, aboutissant à une véritable révolution dans la compréhension de l'esprit humain.

Entre 1894 et 1899, Freud précise dans divers articles un certain nombre de notions déjà présentes à l’état d’ébauche dans ses travaux sur l’hystérie :

●      "Les psychonévroses de défense" (1894) – Cet article introduit le concept de défense comme mécanisme psychique pour lutter contre des pensées ou des émotions insupportables. Freud y prend pour modèle l’hystérie et examine la manière dont des souvenirs ou des désirs sont repoussés hors de la conscience, ce qui conduit à l'apparition de symptômes névrotiques.

 

●      "La névrose d'angoisse" (1895) – Dans cet article, Freud distingue la névrose d’angoisse des autres névroses et en précise les mécanismes spécifiques. Il suggère que l’angoisse est liée à une accumulation de tensions sexuelles non déchargées et à des processus somatiques spécifiques, ouvrant la voie à sa future conceptualisation de la libido.

 

●      "Le refoulement" (1896) – Freud approfondit ici le mécanisme du refoulement, le processus par lequel des pensées ou des désirs inacceptables sont chassés de la conscience et maintenus dans l’inconscient, où ils conservent un pouvoir pathogène. Ce concept deviendra central dans toute la théorie freudienne de l'inconscient.

●      « L’étiologie de la névrose » (1896) (Die Ätiologie der Hysterie). Publié pour la première fois dans les journaux médicaux de l’époque, cet article a suscité une forte réaction dans les milieux scientifiques viennois en raison de l’accent radicalement nouveau mis sur la sexualité infantile.

   À l’époque, cette théorie fut extrêmement controversée, en partie parce qu’elle contrastait avec la théorie de l’"hérédité" des névroses, une vue      prévalente alors.

●      "Les souvenirs-écrans" (1899) – Freud introduit la notion de souvenirs-écrans, où certains souvenirs d’enfance apparemment anodins voilent des souvenirs plus traumatiques, refoulés, mais qui continuent à influencer la vie psychique et à provoquer des symptômes.

  

À la fin du XIXe siècle, plusieurs troubles psychologiques étaient regroupés sous le terme général de neurasthénie, une condition décrivant un épuisement des nerfs et des symptômes variés, tels que la fatigue, l'irritabilité et l'anxiété. Freud, en observant des patients présentant des manifestations très spécifiques d'angoisse aiguë, a commencé à s'interroger sur la validité de cette classification. Il a estimé que ces symptômes d'angoisse devaient être étudiés séparément de la neurasthénie.

Dans l’article “La névrose d'angoisse” (1895) Freud différencie pour la première fois la névrose d'angoisse de la neurasthénie, en la définissant comme une affection spécifique. Il décrit des symptômes que l'on rapprocherait aujourd'hui des attaques de panique. Freud met en lien cette névrose avec des facteurs somatiques et sexuels, soulignant un lien entre le système nerveux et la sexualité.

Il est convaincu que les crises d'angoisse sont en grande partie liées à des perturbations dans la vie sexuelle. Il émet l'hypothèse que la névrose d'angoisse peut être causée par des déséquilibres qui ne sont pas correctement "liquidés" ou exprimés (notamment à travers la satisfaction sexuelle). Cela diffère d'une simple fatigue nerveuse (comme dans la neurasthénie) et implique un dysfonctionnement dans la gestion de l'excitation sexuelle.

 

Un moment fondateur : le cas d'Anna O. et la collaboration avec Breuer

Le cas d'Anna O., souvent considéré comme le point de départ de la psychanalyse, a été décisif dans la découverte freudienne de l'inconscient. Anna O. (de son vrai nom Bertha Pappenheim) était une patiente traitée par Josef Breuer entre 1880 et 1882. Elle souffrait de symptômes hystériques variés : variations de l’humeur, troubles de la vision, paralysie du côté droit, absences peuplées d’hallucinations, troubles divers du langage, etc. Breuer, et plus tard Freud, ont observé que ces symptômes pouvaient être temporairement soulagés lorsque la patiente parvenait à exprimer sous hypnose les souvenirs traumatiques qui leur étaient liés. Nous y reviendrons un peu plus largement dans ce même chapitre.

Cette expérience a conduit Freud à l'idée que ces souvenirs, bien qu'inaccessibles à la conscience ordinaire, continuaient d'influencer le comportement de la patiente. Il a alors commencé à concevoir l'inconscient comme un réservoir de souvenirs refoulés qui, bien que cachés à la conscience, exerçaient une influence puissante sur la vie psychique. La publication des “Études sur l'hystérie” (1895), coécrit avec Breuer, a marqué le début de la psychanalyse en tant que méthode d'investigation des processus inconscients.

L'évolution vers la méthode de l'association libre

Après avoir reconnu les limites de l'hypnose (les symptômes reviennent, les résultats n’étaient pas durables, certains patients n’étaient pas sensibles à la suggestion), Freud développe la méthode de l'association libre, qui est devenue l'une des pierres angulaires de la psychanalyse. Cette méthode, qu'il a commencé à utiliser à la fin des années 1890, consiste à encourager les patients à exprimer sans restriction toutes les pensées qui leur viennent à l'esprit, sans essayer de les organiser ou de les censurer. Freud a découvert que les associations libres permettaient l’investigation de processus psychiques à peu près inaccessibles autrement. Il conduit les patients à dire tout ce qui leur passe par la tête. Les fondements de la psychanalyse sont ainsi posés.

C'est en utilisant cette méthode que Freud a pu approfondir sa compréhension des phénomènes tels que le refoulement, et observer comment les désirs refoulés se manifestent indirectement, par exemple à travers des symptômes névrotiques, des rêves, des actes manqués. Dans “L'interprétation des rêves” (1900), Freud expose l'idée que les rêves sont la "voie royale" vers l'inconscient, où les désirs refoulés trouvent une expression symbolique déguisée. Ce livre, qui marque un tournant décisif dans l'histoire de la psychanalyse, présente l'inconscient non pas comme un simple dépôt de souvenirs oubliés, mais comme une structure dynamique où se jouent des conflits psychiques complexes.

 

Les développements entre 1900 et 1923 : consolidation et complexification

Entre la publication de “L'interprétation des rêves” en 1900 et “Le Moi et le Ça” en 1923, Freud a continué à affiner et à complexifier sa théorie de l'inconscient, intégrant de nouvelles idées et ajustant ses concepts au fil de ses observations cliniques. Pendant cette période, il approfondit certaines de ses élaborations théoriques et apporte deux grandes modifications : sur la théorie des pulsions et sur le fonctionnement de l’appareil psychique.

En 1915, il publie “Pulsions et destin des pulsions”. La théorie de la libido est une composante centrale de la psychanalyse freudienne, il la définit comme une énergie psychique issue des pulsions sexuelles. Freud considérait la libido comme une force motrice essentielle à la vie psychique, jouant un rôle crucial dans le développement psychologique de l'individu et ses relations aux autres.

Cette énergie est présente dès la naissance et traverse différentes phases de développement, chacune associée à une zone érogène spécifique et à des conflits potentiels.

Il distingue les pulsions d’autoconservation qui concernent le Moi et défendent la survie et les pulsions sexuelles dirigées vers l’objet ou vers le moi.

Dans “Au-delà du principe de plaisir” (1920), Freud propose de distinguer les pulsions de vie (Éros) qui assurent les fonctions de liaison et les pulsions de mort (Thanatos) qui assurent les fonctions de déliaison, de rupture, de destruction.  Ces deux forces pulsionnelles sont opposées mais complémentaires dans la dynamique psychique humaine. Les pulsions de vie sont orientées vers la préservation de la vie, la reproduction et la formation de liens affectifs et sociaux. Freud associait Éros à tout ce qui tend à maintenir, unir et construire, qu'il s'agisse de relations amoureuses, de la créativité, ou des efforts pour maintenir la vie et la santé. Éros pousse les individus à rechercher le plaisir, non seulement sous la forme de satisfaction sexuelle, mais aussi dans l'établissement de relations affectives et la réalisation de soi. La pulsion de vie s'exprime à travers la libido, qui s'investit dans des objets extérieurs ou dans le moi. Par exemple, l'amour, l'amitié et la création artistique sont des manifestations de la libido dirigée vers l'extérieur, favorisant la connexion et la cohésion sociale.

En contraste avec Éros, Thanatos représente les tendances destructrices et agressives. Freud a introduit ce concept pour expliquer les comportements autodestructeurs, les conflits internes et la répétition compulsive de situations traumatiques. Thanatos est l'impulsion vers la dissolution, la destruction et la réduction de la vie à son état inorganique. Freud observait que les pulsions de mort se manifestaient souvent par des comportements agressifs envers soi-même ou les autres, comme dans les tendances autodestructrices et les actes de violence. Il considérait que Thanatos et Éros étaient en perpétuelle interaction, créant une dynamique de tension et d'équilibre au sein de la psyché humaine. Cette théorie des pulsions continue encore à faire débat parmi les psychanalystes.

 

Le fonctionnement de l’appareil psychique : Le Ça, le Moi et le Surmoi

En 1923, Freud publie “Le Moi et le Ça”, où il présente sa deuxième théorie de la structure tripartite de l'appareil psychique, composée du Ça, du Moi et du Surmoi. Cette nouvelle topique représente une avancée majeure dans la compréhension des contenus refoulés et de leur interaction avec les exigences de la réalité et les normes sociales.

Avec “Le Moi et le Ça” (1923), Freud propose une nouvelle conception du fonctionnement psychique, en introduisant trois instances qui interagissent de manière complexe : le Ça, le Moi et le Surmoi.

Le Ça est la partie la plus primitive de la psyché, contenant les pulsions instinctives et inconscientes, régies par le principe de plaisir. Le Ça est irrationnel, amoral, et cherche à satisfaire ses désirs immédiatement, sans considération pour les conséquences ou la réalité extérieure. Freud considère le Ça comme le réservoir de l'énergie psychique, notamment de la libido, et comme la source des pulsions sexuelles et agressives. Le Ça agit comme une force brute, cherchant à libérer la tension interne par la réalisation de ses désirs.

Le Moi émerge en tant qu'instance médiatrice entre le Ça et le Surmoi. Il fonctionne selon le principe de réalité, cherchant à trouver des moyens acceptables et réalistes de satisfaire les désirs du Ça, tout en tenant compte des contraintes imposées par le monde extérieur. Le moi est également chargé de maintenir l'équilibre entre les exigences du Ça et les normes morales du Surmoi. Il est en quelque sorte l'administrateur de la psyché, essayant de concilier les impulsions irrationnelles du Ça avec les exigences de la réalité et les interdits du Surmoi.

Le Surmoi représente la dimension morale de l’appareil psychique, internalisant les valeurs, les interdits et les idéaux hérités principalement des figures parentales et de la culture. Le Surmoi se développe à partir des influences externes, à travers l'intériorisation des normes sociales et le Surmoi parental. Il agit comme une conscience morale, imposant des règles et des interdictions auxquelles le Moi doit se soumettre. Le Surmoi peut être une source de culpabilité ou de fierté, selon que le moi réussit ou échoue à répondre aux attentes de cet idéal

Cette présentation révèle la complexité de l'appareil psychique, où le Ça, le Moi, et le Surmoi interagissent dans une dynamique conflictuelle et de compromis qui influence profondément notre comportement, nos pensées et nos émotions.

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Portrait de Sigmund Freud en dessin avec lunettes, barbe blanche, costume et cravate.

Extraits de:

“Lacan pour les patients”

L’algèbre lacanienne

Une formalisation de l’inconscient

L’algèbre lacanienne est un système de notation symbolique et formelle que Jacques Lacan a élaboré pour tenter de représenter les structures complexes de l’inconscient. Inspirée des mathématiques, de la logique et de la linguistique, cette approche vise à traduire les concepts psychanalytiques de manière plus rigoureuse et abstraite. Loin de s’appuyer uniquement sur les descriptions cliniques traditionnelles, Lacan introduit desformules et des schémas qui condensent les relations psychiques fondamentales, rendant plus tangible l’interac­tion entre le sujet, le désir et l’Autre[1]. Ces outils théoriques ont pour objectif de dépasser les limites de l’expression verbale, afin de saisir la dynamique profonde de la psyché.

Le S1 et le S2 : signifiants et structuration du sujet

Parmi les notations les plus emblématiques de l’algèbre lacanienne figurent les symboles S1 et S2. Ces deux signifiants sont au cœur de la représentation de la vie psychique. Le S1 désigne le « signifiant maître », un signifiant qui domine et organise le champ symbolique du sujet. Il est souvent associé au Nom-du-père (voir page 23), c’est-à-dire à la loi qui structure la subjectivité, établissant une position hiérarchique par rapport aux autres signifiants. En d’autres termes, le S1 est ce qui permet au sujet de se constituer autour d’une identité symbolique stable.

Le S2, quant à lui, représente l’ensemble des « signifiants secondaires », ceux qui viennent structurer la réalité psychique à travers la multiplicité des associations et des métaphores qui jalonnent la vie du sujet. Alors que le S1 instaure une position de maîtrise, le S2 déploie le réseau de signifiants qui permet au sujet d’articuler ses expériences et de construire du sens. L’articulation entre le S1 et le S2 montre comment le sujet se situe par rapport à son désir et aux lois symboliques qui le régissent, et illustre la manière dont la signification se construit au travers de chaînes signifiantes, toujours ouvertes et mobiles.

Le mathème : une synthèse universelle du concept psychanalytique

Un autre concept essentiel de l’algèbre lacanienne est celui du mathème. Nous y reviendrons plus loin[2]. Ce terme, forgé par Lacan, désigne une formule concise visant à synthétiser un concept psychanalytique complexede manière universelle. Le mathème est une tentative d’universalisation de la théorie, visant à rendre la transmission de la psychanalyse plus objective et moins tributaire des interprétations subjectives qui peuvent varier d’un praticien à un autre.

Pour donner un seul exemple, le mathème du Nom-du-père est une formalisation qui illustre la façon dont la fonction paternelle intervient dans la structuration de l’inconscient et du désir. Il s’agit d’une manière de représenter la castration symbolique, c’est-à-dire la limitation des attraits de l’enfant par l’intervention de la loi paternelle. Ce processus permet l’accès au désir et à la socialisation. En formalisant cette fonction paternelle, Lacan entend dépasser les descriptions narratives pour proposer une structure de compréhen­sion plus partagée et moins sujette aux ambiguïtés.

Lacan formalise la métaphore paternelle par le mathème qui suit.

Nom-du-père / Désir de la mère : objet a

Ce mathème symbolise la relation entre le Nom-du-père, le désir de la mère et l’objet « petit a » (que nous écrirons dans cet ouvrage « objet a »), l’objet cause du désir. Pour comprendre cette formalisation, décomposons-la.

Nom-du-père / Désir de la mère

La fraction représente la substitution ou la « mise en place » du Nom-du-père dans le champ du désir maternel. En d’autres termes, le Nom-du-père vient « se poser » au-dessus du désir de la mère, créant ainsi une limite à celui-ci.

Objet a

Cette substitution permet l’apparition de l’objet a, c’est-à-dire de l’objet cause du désir. En effet, le Nom-du-père introduit un manque dans la figure maternelle, car il rappelle à l’enfant que la mère désire quelque chose ou quelqu’un au-delà de lui-même. Ce manque génère l’objet a, représentant l’énigme du désir de l’Autre.

Fonction de la substitution dans la structure psychique

La substitution du Nom-du-père pour le désir de la mère a une fonction structurante essentielle :

-     Sortir de la fusion : en s’inscrivant dans le champ symbolique, le Nom-du-père rompt la relation de dépendance fusionnelle entre l’enfant et la mère. La figure paternelle introduit une distance symbolique entre eux, permettant à l’enfant de se percevoir comme un sujet distinct et séparé.

-     Inscrire le manque et le désir : le Nom-du-père indique que la mère n’est pas toute-puissante et qu’elle est elle-même sujette à un manque. Cela inscrit dans le psychisme de l’enfant la notion de manque et de désir, éléments fondamentaux de l’ordre symbolique et du langage.

-     Accéder au symbolique et à la loi : par la fonction paternelle, le sujet est introduit dans le champ du langage et de la loi. Il comprend que certaines limites existent, ce qui structure son rapport à l’Autre et aux règles sociales.

Graphes et schémas

Représenter la dynamique du désir

Outre les signifiants et les mathèmes, l’algèbre lacanienne inclut des graphiques et des schémas. Ces derniers sont utilisés par Lacan pour illustrer la dynamique du désir et la formation du symptôme. Un exemple important est le graphe du désir, qui sert à montrer comment le sujet se déplace à travers une chaîne signifiante, où ses désirs sont perpétuel­lement déplacés, différés, et jamais totalement satisfaits.

Le graphe du désir permet de visualiser les différentes étapes de l’articulation du désir : de l’adresse à l’Autre (c’est-à-dire la manière dont le sujet se positionne dans le discours pour exprimer ses besoins) à la demande, jusqu’à la question de l’être, qui interroge la constitution de l’identité. Ce graphe montre le trajet circulaire du sujet face à l’Autre, illustrant que le désir reste toujours insatisfait, non pas par accident, mais parce que la nature même du désir est d’être toujours à la recherche d’un objet manquant, un objet petit a, impossible à saisir totalement[3].

Le graphe du désir

Le formidable enjeu de la formalisation

Pour Lacan, l’usage de l’algèbre et des mathématiques dans la psychanalyse vise avant tout à formaliser ce qui échappe au sujet conscient. Contrairement à une approche qui tenterait de réduire la complexité psychique à des expériences empiriques et objecti­vables, Lacan utilise ces outils pour représenter une série de relations symboliques qui obéissent à des règles logiques, souvent hors de portée immédiate de la conscience.

Ainsi, les mathèmes, les formules, les signifiants S1 et S2, ainsi que les différents graphes et schémas sont des instruments qui visent à rendre visible l’invisible : ils offrent un moyen d’appréhender la complexité de l’inconscient. Plutôt que de rester dans l’introspection et la verbalisation, ces formalismes permettent de rendre compte des mécanismes sous-jacents de la psyché qui déterminent la formation du désir, l’émergence des symptômes, et les dynamiques de la jouissance.

 L’algèbre lacanienne représente donc une tentative ambi­tieuse de mettre en place un cadre théorique structuré, qui permette d’articuler la pratique clinique à une théorie rigoureuse, capable de transmettre ses concepts de manière non équivoque. En ce sens, elle fait écho à la volonté de Lacan de préserver la spécificité et la radicalité de la psychanalyse, tout en l’ouvrant à des disciplines extérieures telles que la linguistique, la logique, ou la philosophie.

L’algèbre lacanienne est une approche à la fois audacieuse et nécessaire pour penser l’inconscient autrement. En s’écartant des descriptions traditionnelles pour se tourner vers des notations formelles, Lacan offre aux psychanalystes un outil qui permet de naviguer à travers les méandres du désir et de la subjectivité de façon plus précise. Cette formalisation n’a pas pour but de simplifier la psychanalyse, mais plutôt de rendre ses concepts accessibles de manière plus universelle, offrant une meilleure compréhension des structures incon­scientes qui façonnent le sujet.

 

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Lacan debout dans une salle de cours de psychanalyse parlant à côté d'un pupitre avec un microphone.

Extraits de:

« Séminaires de Jacques Lacan Tome I

1953 – 1964

Citations, Interprétations et Commentaires»

 

1953-1954  

« Les Écrits techniques de Freud » 

Ce premier séminaire de Jacques Lacan, tenu à Sainte-Anne de 1953 à 1954, constitue l’acte inaugural de sa réélaboration du freudisme par la voie du langage. Il s’y présente à la fois comme lecteur rigoureux de Freud et comme critique de la psychanalyse de son temps, notamment celle influencée par la psychologie de l’ego.

Dès ce séminaire, Lacan affirme une thèse fondamentale : l’inconscient est structuré comme un langage, et cette structure doit commander la direction de la cure, le statut du transfert, le rôle de l’analyste, et la logique du symptôme.

Trois axes théoriques majeurs

1.     La primauté du langage et du signifiant

Lacan explore les mécanismes du rêve, du mot d’esprit, du transfert, en montrant que leur logique relève de celle du signifiant : glissement, condensation, substitution, double entente, etc. Ces processus, loin d’être de simples contenus à interpréter, renvoient à une logique formelle. Ce que le sujet cherche dans l’Autre, ce n’est pas un sens, mais une reconnaissance, et cette reconnaissance passe par les signifiants.

2.    Le transfert comme structure discursive

Le transfert n’est pas un “obstacle” mais un moteur de la cure. Il est avant tout une mise en acte de la demande, et cette demande, comme tout énoncé, s’adresse à un Autre supposé savoir. Lacan insiste ici : le transfert n’est pas affectif, il est logique. L’amour de transfert est un effet de structure, une manière de poser la question du sujet dans l’Autre.

3.    La fonction de l’analyste

L’analyste est celui qui occupe la place vide de l’Autre, celui qui écoute sans répondre directement, pour faire surgir les signifiants du sujet. Il ne s’agit pas de comprendre le patient, mais de le conduire à entendre ce qu’il dit sans le savoir, c’est-à-dire à faire émerger le sujet du signifiant. La position de l’analyste est marquée par la neutralité bienveillante, mais surtout par l’écoute orientée par le manque.

Quelques enjeux cliniques essentiels

•       La cure analytique n’est pas une pédagogie du moi, mais une traversée de ses illusions imaginaires. Le moi est méconnaissance. Ce qu’il faut analyser, c’est le sujet de l’inconscient, non l’individu psychologique.

•       Lacan met en lumière le rôle du fantasme, déjà en filigrane dans ce séminaire, comme scénario fondamental où le sujet organise sa position face à l’Autre. Ce sera un axe majeur de ses séminaires suivants.

•       Il réévalue également la notion de résistance, non comme une défense du moi, mais comme un effet de la structure signifiante de la demande: c’est la position du sujet dans le langage qui fait obstacle, pas une volonté psychique.

 

La refondation de la psychanalyse

Ce séminaire I est à lire comme un manifeste. Lacan y réinscrit Freud dans une lecture structurale, en affirmant que seule une approche rigoureusement linguistique peut préserver la radicalité de la découverte freudienne. La psychanalyse n’est pas un art du soin, ni une introspection guidée : elle est une éthique du dire, une logique du sujet, un travail de vérité.

Il prépare ainsi le terrain des grandes avancées théoriques à venir : le graphe du désir, les quatre discours, la topologie des registres RSI… tout est en germe ici. La cure analytique est une expérience du langage où le sujet rencontre non ce qu’il est, mais ce qui lui manque, et c’est dans cette béance que surgit son désir.

 

 

Séance du 18 novembre 1953

« La pensée de FREUD est la plus perpétuellement ouverte à la révision. C’est une erreur de la réduire à des mots usés : inconscient, super ego… Chaque notion y possède sa vie propre, ce qu’on appelle précisément la dialectique : elle a un contraire, etc. »

Dès cette première leçon inaugurale, Lacan place son auditoire devant une exigence fondamentale : l’ouverture perpétuelle de la pensée freudienne. En affirmant que Freud ne se laisse pas enfermer dans quelques mots-clés — « inconscient », « surmoi » — devenus des signifiants figés, Lacan réintroduit le mouvement, la dialectique, dans l’héritage freudien.

Il ne s’agit pas de répéter Freud comme une doctrine close, mais de le lire comme une pensée vivante, toujours susceptible d’être révisée, déplacée, relancée. Chaque concept freudien ne prend sens qu’en tension, dans une relation dialectique : il n’existe pas de concept isolé, chaque terme appelle son contraire, se définit par une opposition, une coupure. Ainsi, l’inconscient ne se comprend qu’à partir du conscient, le désir à partir de la loi, la pulsion à partir de l’interdit.

Ce principe dialectique inscrit Freud dans la lignée des grandes pensées philosophiques, et Lacan le rapproche implicitement d’Hegel, mais aussi de la logique des maîtres grecs : une notion n’existe que dans la confrontation à son autre. La psychanalyse, loin d’être une psychologie statique, est un champ de tensions, un espace où la vérité se dit par contrastes et contradictions.

Sur le plan clinique, cette perspective protège la psychanalyse contre toute sclérose. Un analyste qui se contenterait de manier les concepts comme des étiquettes mortes, de diagnostiquer à coups de « surmoi » ou « refoulement », trahirait la vitalité même de la pensée freudienne. La cure suppose au contraire de saisir la vie des signifiants dans leur mouvement, dans leurs renversements, dans les effets imprévus de la parole.

Lacan inaugure donc son premier grand séminaire public par une consigne méthodologique et éthique : penser Freud contre la tentation de le fossiliser. Freud n’est pas un dogme, mais une ouverture, une invitation à laisser parler le texte, à le reprendre dans sa dynamique. La psychanalyse est ainsi vouée à demeurer une discipline toujours en mouvement, fidèle à son fondateur précisément dans la mesure où elle refuse de l’ériger en idole immobile.

 

Séance du 13 janvier 1954

« Pour commencer l’année nouvelle… je l’introduirai volontiers par un thème que j’exprimerai à peu près ainsi : “fini de rire !”. […] D’abord, parce que c’est la loi même et la tradition du séminaire que ceux qui y participent y apportent plus qu’un effort personnel. Ils apportent une collaboration par les communications effectives. »

 

Lacan inaugure l’année 1954 sur un ton à la fois ironique et solennel : « fini de rire ! ». Cette formule, à demi-plaisanterie, contient pourtant une exigence fondamentale. Le séminaire, insiste-t-il, ne saurait rester une scène où l’auditoire se contenterait d’écouter passivement l’enseignant. Il doit devenir un lieu d’échanges, où la parole circule, où chacun contribue activement à l’élaboration commune.

Ce rappel de la « loi du séminaire » prend une valeur qui dépasse le simple cadre pédagogique. Car ce que Lacan met en place, dès ses premiers séminaires, c’est une pratique discursive qui fait écho à la psychanalyse elle-même. Comme dans la cure, où l’analysant ne peut attendre passivement que l’analyste lui livre une vérité, les participants doivent « mettre du leur », risquer leur parole, s’engager dans la construction collective du savoir.

Cette injonction souligne que le savoir psychanalytique n’est pas de l’ordre de l’enseignement dogmatique, mais de l’élaboration partagée. Le savoir ne se transmet pas comme une vérité close, mais se produit dans l’acte même de la parole. En ce sens, le séminaire reproduit, à une autre échelle, la structure de l’expérience analytique : c’est en parlant, en exposant ses associations, ses hypothèses, ses lectures, que surgit le savoir.

 

Cliniquement, cette exigence trouve son parallèle dans le transfert. De même que le patient ne reçoit pas des interprétations toutes faites, mais doit livrer ses associations et ses résistances, les participants du séminaire ne peuvent se contenter d’une position d’élève passif. Lacan exige d’eux qu’ils s’exposent, qu’ils prennent part à l’œuvre collective.

En somme, derrière l’ironie du « fini de rire ! », Lacan trace une règle de conduite : la psychanalyse est une affaire de travail, de mise en acte, de production commune. La parole n’y est jamais décorative : elle engage, elle fait surgir un savoir. Ce séminaire devient alors l’écho même de ce qu’il enseigne : une pratique où le savoir se constitue à partir de la parole vivante et du partage, et non d’une autorité qui dicterait un savoir clos.

 

Séance du 20 janvier 1954

« Je mets en fait qu’actuellement parmi les analystes… et qui pensent, ce qui déjà rétrécit le cercle… il n’y en a peut-être pas un seul, dans le fond, qui se fasse la même idée qu’un quelconque de ses contemporains, ou de ses voisins sur le sujet… n’êtes-vous pas d’accord, Michèle Cahen ?… sur le sujet de ce qu’on fait, de ce qu’on vise, de ce qu’on obtient, de ce qu’il s’agit… »

Dans cette phrase incisive, Lacan met en lumière une confusion radicale qui régnait, déjà à son époque, parmi les analystes quant au sens de leur pratique. Non sans ironie, il note qu’« il n’y en a peut-être pas un seul » qui partage avec son voisin la même conception de ce qu’est l’analyse : ce que l’on y fait, ce que l’on y vise, ce que l’on y obtient.

Lacan souligne ici le paradoxe d’une discipline née de Freud, qui a pourtant déjà dérivé en une pluralité de conceptions divergentes. L’analyste français, l’analyste anglais, le kleinien, le freudien orthodoxe, chacun développe une doctrine technique qui lui est propre, au point que l’unité même de la psychanalyse semble compromise. Ce constat n’est pas une lamentation nostalgique : il sert de point de départ à Lacan pour affirmer que l’expérience analytique ne peut pas se réduire à un consensus de recettes techniques, mais qu’elle appelle un retour rigoureux à la structure, c’est-à-dire à la logique du langage et du signifiant.

En interpellant son auditoire — et nommément Michèle Cahen — Lacan donne à cette remarque une valeur pédagogique. Il ne s’adresse pas à des élèves passifs, mais les place face à la question brûlante : qu’est-ce que nous faisons quand nous faisons de l’analyse ? Il renverse ainsi le rapport entre maître et étudiants, en obligeant chacun à répondre de sa propre pratique, à s’interroger sur ce qu’il met en jeu dans le transfert et dans la cure.

Cette dénonciation de la dispersion doctrinale préfigure toute la visée de Lacan : réintroduire dans la psychanalyse un principe de cohérence, non pas en imposant une orthodoxie, mais en revenant à ce qui, dans Freud, touche à la structure de l’inconscient comme langage. La diversité des techniques peut bien exister, mais elle doit être rapportée à une logique commune, sans quoi la psychanalyse risque de se dissoudre dans l’arbitraire ou le psychologisme.

La formule conserve aujourd’hui une résonance aiguë : la psychanalyse demeure travaillée par des divergences théoriques et pratiques, et c’est précisément ce que Lacan avait vu dès le début de son enseignement. En posant cette question, il inaugurait déjà la nécessité d’un recentrage théorique, celui qu’il n’a cessé de construire tout au long de ses séminaires.

 

 

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Extraits de:

« Séminaires de Jacques Lacan

 Tome II

1964 – 1980

Citations, Interprétations et Commentaires»

 

1964-1965

« Problèmes cruciaux pour la psychanalyse »

Le Séminaire XII – Problèmes cruciaux pour la psychanalyse (1964–1965) marque une transition capitale dans l’enseignement de Lacan, à la croisée de sa réflexion sur le signifiant, l’objet a, le fantasme, et le transfert, dans le sillage du Séminaire XI. C’est un séminaire dense, qui permet une exploration rigoureuse.

Commençons donc avec la séance inaugurale du Séminaire XII – Problèmes cruciaux pour la psychanalyse, datée du 2 décembre 1964. Dans cette ouverture, Lacan s’inscrit dans la continuité du Séminaire XI tout en annonçant un déplacement : il ne s’agira plus simplement d’élaborer les concepts fondamentaux, mais d’interroger leurs points de faille, leurs apories, et surtout, leur effet dans la pratique.

Séance du 2 décembre 1964 (Leçon 1) Dès le début, Lacan choisit deux références littéraires pour introduire son propos : une phrase célèbre de Chomsky et un vers de Racine.

                        « Colorless green ideas sleep furiously — Furiously sleep ideas green colorless. » (N. Chomsky, Structures syntaxiques)

            « Songe, songe Céphise, à cette nuit cruelle / Qui fut pour tout un peuple une nuit éternelle. » (Racine, Andromaque)

Lacan inaugure ce séminaire en posant côte à côte deux énoncés qui appartiennent à des univers apparemment étrangers : une phrase inventée par Chomsky pour illustrer l’autonomie de la syntaxe par rapport au sens, et deux vers de Racine qui concentrent toute la puissance de la tragédie classique. Ce rapprochement insolite constitue une entrée en matière programmatique : il s’agit d’examiner ce qui fait qu’une suite de mots devient discours, qu’elle touche au vrai ou au sujet.

La phrase de Chomsky est célèbre parce qu’elle est syntaxiquement correcte, mais sémantiquement absurde : «des idées vertes incolores dorment furieusement ». Ce paradoxe prouve que la grammaire n’est pas déterminée par le sens : une langue peut générer des énoncés formellement valides mais dépourvus de contenu. Le langage n’est donc pas d’abord un instrument de communication transparente, il est une machine structurale.

À l’inverse, les vers de Racine ne valent pas seulement par leur correction grammaticale — qui est parfaite — mais par leur capacité à condenser en quelques mots une mémoire tragique : l’évocation d’une « nuit cruelle », celle du massacre des Troyens, qui résonne comme une nuit « éternelle » pour tout un peuple. Ici, le langage agit au-delà de la syntaxe : il convoque l’histoire, la douleur, l’affect, et touche immédiatement au sujet dans sa dimension d’expérience.

 

Lacan, en juxtaposant ces deux énoncés, construit une sorte de chiasme inaugural :

            •          Chomsky illustre la structure sans vérité : le langage peut fonctionner mécaniquement, sans produire de sujet.

            •          Racine illustre la vérité par le langage : une formule poétique, pourtant brève, fait surgir la mémoire, le tragique, et atteint le sujet dans son être.

C’est précisément dans cette tension que s’inscrit la psychanalyse. L’inconscient, selon Lacan, n’est pas un stock de représentations enfouies, mais un langage qui fonctionne, comme chez Chomsky, selon des lois de combinaison formelles. Mais il est aussi ce lieu où surgit, comme dans Racine, une vérité qui dépasse le sens immédiat et qui engage le sujet dans sa division.

En ouvrant son séminaire par ce contraste, Lacan prévient ses auditeurs : les problèmes cruciaux ne pourront être abordés qu’en tenant ensemble ces deux pôles — la rigueur du signifiant comme structure, et la puissance du langage comme porteur de vérité subjective. La psychanalyse, dès lors, n’est ni pure linguistique, ni pure littérature, mais l’articulation des deux : la science du signifiant en tant qu’il fait surgir une vérité qui touche le sujet.

 

Séance du 9 décembre 1964

On y trouve une indication très claire sur le projet de Lacan pour cette année :

« Le problème qui va nous occuper d’entrée cette année, c’est celui du rapport du sujet au langage. »

Cette phrase inaugure véritablement le séminaire. En affirmant que le problème central sera « le rapport du sujet au langage », Lacan signale à la fois une continuité et une rupture.

            •          Continuité, car cette orientation reprend le fil de son enseignement depuis le Discours de Rome (1953), où il affirmait déjà que « l’inconscient est structuré comme un langage ».

            •          Rupture, car il ne s’agit plus seulement d’utiliser le langage comme métaphore pour penser l’inconscient, mais de s’interroger sur la manière dont le sujet lui-même n’existe qu’à partir de son inscription dans la chaîne signifiante.

Cette proposition engage une critique radicale de toute psychologie qui ferait du sujet une entité autonome, préalable au langage. Le sujet, chez Lacan, n’est pas une « donné » mais un effet : il est représenté par un signifiant pour un autre signifiant. Ce qui veut dire que sa vérité ne réside jamais dans une identité stable, mais dans une relation différentielle, dans un jeu de substitutions et de manques.

En introduisant ce thème « d’entrée », Lacan met en tension deux perspectives :

            1.         D’un côté, la linguistique structurale (Saussure, Jakobson), qui montre que le langage fonctionne comme un système différentiel de signifiants.

            2.         De l’autre, la clinique freudienne, où le sujet se révèle à travers des formations de l’inconscient — rêves, lapsus, symptômes — qui manifestent l’action du langage là où il échappe à la conscience.

L’enjeu de ce séminaire est d’articuler ces deux perspectives, afin de faire apparaître que le sujet de l’inconscient n’est pas un sujet de savoir, mais un sujet divisé, produit par un rapport structural au langage qui l’aliène en même temps qu’il le fonde.

Il y a là une portée éthique et politique : si le sujet est effet de langage, il n’existe pas de vérité absolue du sujet en dehors du discours. Toute subjectivité est relative à une structure symbolique, à une histoire de signifiants. C’est ce qui rend possible l’expérience analytique : en modifiant la chaîne signifiante par l’interprétation, on déplace le rapport du sujet à son désir.

Cette phrase du 9 décembre 1964, apparemment simple, condense le programme entier du séminaire. Elle annonce que la psychanalyse ne sera pas une psychologie de l’intériorité, mais une science du langage appliquée à la subjectivité. Plus encore, elle prépare la thèse cruciale : le sujet n’est pas maître de son langage, il est parlé par lui et c’est cette dépendance constitutive qui constitue l’objet même de l’analyse.

 

Séance du 16 décembre 1964

Cette séance s’ouvre sur une critique des prétentions de la psychologie académique et de sa prétendue scientificité. Lacan y déploie une métaphore ironique : si les psychologues prétendaient connaître l’âme comme objet, ils devraient pouvoir en exposer les « spécimens » comme les conchyliologistes présentent les coquillages dans un musée.

            « Si la psychologie, quel que soit son objet… Mais cet objet même, comme on le soutient vainement, pouvant être défini comme unique, cet objet, de quelque façon, pouvant nous conduire, par quelque voie que ce soit, à la connaissance… Autrement dit, si l’âme existait, si la connaissance relevait de l’âme, les professeurs de psychologie devraient se recruter par les moyens mêmes dont ils appréhendent leur objet. »

Dans cette provocation, Lacan règle ses comptes avec la psychologie universitaire. Il rappelle que la prétendue science de l’âme n’a jamais produit son objet, et qu’elle se fonde sur un postulat métaphysique – l’existence d’une substance appelée « âme » – que rien n’atteste. Par contraste, la psychanalyse se définit précisément par la découverte freudienne : l’objet de son savoir n’existe pas comme une chose, mais se manifeste dans les formations de l’inconscient, dans ce qui échappe au sujet lui-même.

La comparaison avec la conchyliologie est frappante : tandis que le naturaliste peut montrer, aligner, classer les coquilles, le psychologue n’a rien à exposer, sinon des discours qui prétendent à la science. La métaphore dévoile l’écart entre une science des objets et le discours analytique, qui s’occupe du sujet divisé.

Cette intervention est d’une portée politique dans le champ académique : Lacan refuse de laisser la psychanalyse se confondre avec une psychologie empirique ou cognitive, qu’il juge incapable de rendre compte du désir et de l’inconscient. Elle est aussi théorique : l’objet de la psychanalyse ne saurait être une entité positive, mais un manque, un vide, une place. C’est à partir de cette béance que se déploient les concepts de l’identification, du fantasme et du sujet de l’inconscient, qui constitueront le cœur de cette année d’enseignement.

Dans la même séance Lacan quitte la polémique contre la psychologie pour introduire la question de l’identification et de son repérage topologique.

            « Or, la façon dont nous avons à définir x ce dont il s’agit dans l’analyse, qui est bien évidemment le repérage du désir… ce désir, nous devons savoir x le définir, en relation avec cette passe, ce phénomène, qui lui est assurément lié d’une certaine façon, que là, nous ne commençons qu’à appréhender, qu’à déchiffrer, qu’à approcher, à savoir l’identification. »

Ce passage est décisif : il montre que Lacan, dès 1964, cherche à donner une forme mathématisée à l’expérience analytique. Il ne suffit plus, dit-il, de décrire le désir en termes narratifs ou cliniques. Il faut en donner une figure topologique, c’est-à-dire une écriture qui rende compte des liens structurels, indépendamment du contenu psychologique.

Lacan associe ici trois termes : désir, passe, identification. Le désir, comme moteur de l’analyse ; la passe, comme moment de bascule où le sujet reconnaît la fonction de l’analyste ; et l’identification, comme opérateur qui fixe le sujet à un trait. Chacun de ces termes renvoie à une logique qui excède la psychologie descriptive. La topologie devient alors l’outil pour penser comment un intérieur se retourne en extérieur, comment un sujet se constitue par une coupure, comment une identification se noue autour d’un vide.

L’enjeu est considérable : si l’on peut donner une définition topologique du désir, alors l’analyse ne repose plus sur des métaphores ni sur des récits de vie, mais sur une logique formelle. Cela ne veut pas dire qu’on réduise la clinique à des schémas, mais que ces schémas révèlent le réel en jeu : la structure même du rapport du sujet à l’Autre.

Dans ce geste, Lacan prépare déjà ses développements futurs sur les surfaces projectives et les nœuds borroméens. L’identification ne peut se penser comme un simple processus psychologique, mais comme un nouage. Le désir n’est pas une pulsion libre, mais une trajectoire contrainte par une structure topologique.

La séance du 16 décembre marque un pas décisif : en reliant désir, identification et passe à une logique topologique, Lacan annonce que la psychanalyse ne pourra se maintenir dans la rigueur que si elle ose franchir ce seuil formel, celui d’un discours qui se supporte d’une écriture et non plus seulement d’un récit.

 

Séance du 6 janvier 1965

            « Problèmes pour la psychanalyse. C’est ainsi que j’ai entendu situer mon propos pour cette année. Pourquoi, après tout, n’ai-je pas dit : Problèmes pour les psychanalystes ? »

Cette entrée en matière a toute la valeur d’une précision méthodologique. Lacan ne veut pas centrer son séminaire sur les « psychanalystes » — leurs querelles, leurs identités, leurs institutions — mais sur la psychanalyse elle-même. En d’autres termes, il se refuse à un discours corporatiste ou disciplinaire pour affronter directement les impasses théoriques et pratiques de la psychanalyse comme expérience.

La nuance est capitale. Parler des « problèmes pour les psychanalystes », ce serait se limiter aux difficultés propres à une profession. Mais Lacan vise plus haut : il s’agit de saisir les problèmes cruciaux de la psychanalyse, c’est-à-dire ce qui met en jeu la logique même de l’inconscient et les conditions de l’acte analytique.

Ce déplacement inscrit son enseignement dans une perspective éthique : ce n’est pas la communauté des analystes qui est la mesure, mais l’exigence de vérité qui habite la psychanalyse. Cette rigueur explique pourquoi Lacan s’est souvent trouvé en désaccord avec les institutions analytiques, car il refusait de réduire la pratique à un métier ou à une identité sociale.

Le choix des mots, ici, met déjà en place la question de l’identification (thème majeur de l’année). De quoi s’agit-il? De se demander si l’analyste s’identifie à une fonction, à un maître, à une doctrine, ou bien s’il est défini par le désir qui soutient sa pratique. En ne parlant pas des « psychanalystes», mais de la « psychanalyse », Lacan suggère que l’analyste n’existe pas comme figure achevée : il est en suspens, défini par un acte et non par un statut.

Cette précision du 6 janvier 1965 n’est pas un détail de vocabulaire : elle annonce le mouvement de l’année. Les « problèmes cruciaux » ne sont pas ceux d’une corporation, mais ceux d’un savoir en devenir, toujours menacé de se fermer, toujours obligé de se réinterroger à partir de son cœur : le sujet, le signifiant, le désir.

 

Séance du 13 janvier 1965

« La vérité, dans son statut, n’est pas une révélation. Elle n’apparaît jamais que mi-dite. »

Cette formule, d’une simplicité frappante, est l’une des plus riches du Séminaire XII. En affirmant que la vérité « n’apparaît jamais que mi-dite », Lacan ouvre un champ conceptuel et éthique qui dépasse largement le cadre de la psychanalyse pour toucher à la condition humaine elle-même.

Une rupture avec la tradition métaphysique et religieuse

La tradition occidentale a souvent pensé la vérité comme révélation : dévoilement soudain de ce qui était caché, manifestation intégrale d’une lumière. C’est le modèle religieux de la révélation divine, mais aussi, dans une certaine mesure, le modèle philosophique de l’idéalisme où la vérité est supposée accessible dans son intégrité par la raison. Lacan s’y oppose frontalement. Pour lui, il n’y a pas de vérité entière, pas de transparence totale. La vérité se donne toujours par fragments, par équivoques, dans l’inachèvement.

La logique du « mi-dire »

Dire que la vérité est « mi-dite », c’est rappeler que le langage est toujours marqué par une limite. Un dire ne peut pas tout dire. Il y a dans la structure même du signifiant un impossible à saturer le réel. Ainsi, l’inconscient, qui se manifeste par le langage, n’offre jamais que des bouts de vérité : un lapsus, un mot d’esprit, un rêve. Ces formations sont autant de mi-dire où la vérité se glisse, mais sans se livrer jamais toute.

Portée clinique

C’est là que se joue l’éthique de la pratique analytique. L’analyste n’est pas celui qui révélerait au patient une vérité totale sur lui-même, comme s’il détenait le savoir ultime de son inconscient. L’analyste est celui qui soutient l’espace du mi-dire, qui accueille la vérité là où elle surgit en fragments, et qui permet au sujet de l’entendre. L’interprétation n’est donc pas une explication complète, mais une intervention qui fait résonner un reste, qui ouvre sur une autre dimension du dire.

Portée politique et culturelle

Lacan inscrit ici la psychanalyse dans une logique moderne, voire post-moderne : il n’existe pas de grand récit totalisant qui pourrait dire la vérité une fois pour toutes. Toute vérité est relative à une structure discursive, et son statut est celui d’un mi-dire. C’est ce qui distingue la psychanalyse de la philosophie hégélienne du Savoir absolu, mais aussi des idéologies qui prétendent posséder la vérité du monde ou de l’histoire.

Une éthique du manque

Enfin, ce « mi-dire » fonde une éthique : accepter que la vérité se dit toujours à moitié, c’est consentir à la castration symbolique, à la limite constitutive de notre rapport au langage. La psychanalyse se veut fidèle à ce manque, et c’est là sa dignité. Là où d’autres discours promettent des vérités entières, la psychanalyse rappelle que la vérité ne peut être qu’entrevue, fragmentée, traversée par le vide qui la rend possible.

En somme, cette phrase du 13 janvier 1965 est un véritable manifeste : elle définit le rapport de la psychanalyse à la vérité, non pas comme savoir absolu, mais comme mi-dire, comme reste, comme béance. C’est cette conception qui distingue radicalement l’expérience analytique de toute tentative de maîtrise intellectuelle ou idéologique.

 

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Marcelo Gargiulo assis dans un fauteuil à côté d'un petit chien de race terrier .